Scaling produit : comment structurer une organisation à grande échelle (Squads, Tribes, Shape Up)

Product Management

Le vrai sujet, c’est de structurer l’organisation pour réduire la charge cognitive, clarifier qui décide quoi, et aligner produit + tech + business sur un même tempo.

Cyrille
Écrit par
Cyrille
mis à jour le
27.11.2025
Chief Product Officer & Co-Founder

Au début, tout va vite. Puis l’organisation grandit. Les squads se multiplient, les dépendances aussi. L’alignement se dilue, les arbitrages rallongent, chacun optimise son périmètre… et le produit ralentit alors que les équipes grossissent.

C’est le paradoxe du scale : plus on ajoute de monde, plus on perd en vitesse. Pas à cause du talent - à cause de la complexité.

C’est là que beaucoup d’entreprises tentent le move Squads, Tribes, Chapters… en espérant que le modèle résolve leurs problèmes d’alignement. Mais un modèle ne règle rien si le système n’est pas prêt. 

👉 Le vrai sujet, c’est de structurer l’organisation pour réduire la charge cognitive, clarifier qui décide quoi, et aligner produit + tech + business sur un même tempo.

Dans cet article, on décrypte comment scaler sans casser la vitesse : quand changer de modèle, comment choisir entre squads, tribes ou Shape Up, et comment construire une organisation qui tient vraiment la route quand l’équipe passe de 20 à 200 personnes.

Les signaux qu’il est temps de scaler (et ceux qui sont juste du bruit)

Beaucoup d’organisations pensent devoir scaler parce qu’elles grossissent. En réalité, le scale n’est pas une question de taille, mais une question de tensions dans le système.

Voici les signaux qui, sur le terrain, indiquent qu’il faut structurer autrement - et ceux qui ne sont que des symptômes de surface.

Les décisions ralentissent malgré plus de monde

Plus d’équipes, plus de PMs, plus de tech leads… et paradoxalement, les arbitrages prennent plus de temps qu’avant.

Les symptômes :

  • temps pour valider une initiative x2 ou x3 ;
  • décisions bloquées 3–10 jours faute de “bonne” coordination.

C’est le signe que la gouvernance ne suit plus la croissance.

Les dépendances explosent

Chaque squad avance… mais dépend de deux autres.
Chaque livraison est un mini-projet cross-squad.
On passe plus de temps en synchronisation qu’en delivery.

Les indicateurs concrets :

  • 30 à 50 % des tickets nécessitent une intervention d’une autre équipe ;
  • les tests d’intégration deviennent le goulet d’étranglement ;
  • les roadmaps se télescopent.

C’est le signal qu’il faut redéfinir les périmètres, pas ajouter des rituels.

“Quand on est arrivés, l’équipe pensait avoir un problème de vitesse. En réalité, ils avaient un problème de dépendances : 70 % des tickets passaient par trois équipes différentes. Après avoir redéfini les domaines et les zones de responsabilité, la vitesse par squad a augmenté sans recruter une seule personne.”
— Amélie, Product Strategist @ Yield

On perd l’alignement sur la vision

Quand l’organisation grandit, la vision se dilue.
Chaque squad optimise son domaine, parfois déconnectée des paris stratégiques.

Les signes visibles :

  • 3 versions différentes du “problème prioritaire” ; 
  • des squads qui livrent beaucoup mais impactent peu ;
  • des OKR interprétés différemment selon les équipes.

Le système n’est plus piloté par la valeur, mais par les backlogs.

La dette organisationnelle dépasse la dette technique

On parle souvent de dette tech, mais le scale révèle une dette bien plus coûteuse :
la dette d’organisation.

Concrètement :

  • rôles flous ;
  • PMs débordés par le cross-team ;
  • PMs > Tech Leads > CPO qui compensent les trous du système ;
  • décisions prises hors-process faute de cadre.

C’est le signe qu’il faut structurer la delivery, pas juste embaucher.

⚠️ Les faux signaux (qui ne justifient pas un passage en squads)

Beaucoup de signaux ressemblent à un besoin de scale… alors qu’ils traduisent surtout un défaut de priorisation ou de focus. Les traiter comme un problème d’organisation ne ferait qu’ajouter de la complexité.

❌ “On manque de devs”

Ce n’est pas un problème de structure, mais de capacité ou de priorisation.

❌ “On veut plus d’autonomie”

L’autonomie n’est pas un modèle.
C’est une conséquence d’un bon découpage — ou elle se transforme en chaos.

❌ “Spotify le fait, on devrait le faire aussi”

Le modèle Spotify n’est pas un modèle. C’est un retour d’expérience d’une entreprise très spécifique, dans un contexte très spécifique.

Squads, Tribes, Chapters, Shape Up : comprendre les modèles (et ce qu’ils résolvent vraiment)

L’erreur qu’on voit le plus souvent : choisir une structure… avant de comprendre les tensions qu’elle doit absorber. Voici ce que chaque modèle traite réellement, et ce qu’il ne traite pas.

Le modèle Squads / Tribes : réduire les dépendances, augmenter la vélocité

C’est le modèle qu’on explore en premier quand la complexité dépasse la capacité de synchronisation des équipes. Mais il ne fonctionne que si on comprend précisément ce qu’il doit absorber.

Ce que ça résout :

  • des périmètres clairs (“domains”) ;
  • une autonomie opérationnelle réelle ;
  • une capacité à livrer en parallèle sans se marcher dessus.

Ce que ça ne résout pas :

  • la vision floue ;
  • des impacts non définis ;
  • des PMs sous-staffés ou isolés.

👉 Un bon modèle squad, ce n’est pas une squad par page ou par feature.
C’est une squad par problème métier durable.

Check express pour savoir si vos squads sont bien découpées :

  • Chaque squad a un objectif d’impact mesurable ;
  • Elle peut livrer sans coordination quotidienne avec 2 autres équipes ;
  • Son domaine évolue à moyen terme (> 6 mois).

Si vous cochez seulement 1 ou 2 cases, ce n’est pas une squad : c’est une équipe projet déguisée.

Les Tribes : synchroniser les domaines sans recréer une usine à réunions

Une Tribe fonctionne quand elle joue un rôle très clair : absorber les dépendances transverses et maintenir la cohérence produit.

Elle devient inutile si :

  • elle anime un rituel de plus ;
  • elle sert uniquement à organiser des démos ;
  • elle n’a pas de périmètre d’impact commun.

La bonne question n’est pas “Devrions-nous créer une Tribe ?”
C’est : “Quel ensemble de squads partage un objectif systémique ?”

Shape Up : réduire le bruit, décider moins souvent mais mieux

Shape Up attire beaucoup d’équipes parce qu’il promet deux choses rares : des cycles stables et l’absence de micro-gestion.

Ce que Shape Up apporte réellement :

  • un découpage par paris (bets) plutôt que par features ;
  • des cycles protégés de 6 à 8 semaines ;
  • un focus fort sur la solution “shapée” (désengorgement du PM).

Mais Shape Up échoue systématiquement quand :

  • la vision est floue ;
  • les équipes manquent d’autonomie technique ;
  • le découpage n’a pas de frontières fonctionnelles solides.

👉 Shape Up n’est pas un modèle d’organisation. C’est un cadre de delivery.
Sans une structure claire en amont, il fait exploser les dépendances au lieu de les réduire.

Comment choisir la bonne organisation pour votre contexte

La pire erreur, quand on scale, c’est de choisir une organisation avant de choisir le problème. Le bon modèle n’est pas celui qui fonctionne ailleurs. C’est celui qui retire la friction la plus coûteuse dans votre contexte.

Chez Yield, on observe toujours le même schéma : avant de changer une orga, il faut clarifier ce qui bloque réellement. Et seulement ensuite choisir le minimum de structure pour débloquer le système.

Quand l’enjeu principal, c’est l’autonomie → Découper en domaines / squads

Si chaque livraison dépend de deux autres équipes, si 40-70 % des tickets nécessitent une coordination transversale, si les arbitrages deviennent des projets à part entière…

… ce n’est pas un problème de vitesse. C’est un problème de périmètres mal dessinés.

Dans ce cas, le bon modèle n’est pas Spotify. C’est un découpage métier stable, avec des équipes responsables de bouts de produit réellement indépendants.

Squads = un moyen d’isoler la valeur, pas d’organiser le chaos.

Quand le problème, c’est le manque de focus → Passer en cycles Shape Up

Certaines équipes n’ont pas un problème d’autonomie. Elles ont un problème de dispersion.

Tout avance en parallèle, rien ne se termine vraiment.
Les PM gèrent 12 threads en même temps.
Les devs changent de sujet toutes les 48 h.

Dans ce cas, changer l’organisation n’aide pas.

Il faut changer le tempo : des cycles courts, des paris clairs, un périmètre protégé.
Shape Up fonctionne parce qu’il coupe le bruit - pas parce qu’il réinvente la squad.

Quand l’incohérence devient visible → Renforcer Chapters / Guilds

Dès que plusieurs équipes travaillent sur le même produit, la dérive arrive vite : composants dupliqués, UX différentes, standards oubliés.

Ce n’est pas un problème de structure. C’est un problème de qualité partagée.

Les chapters / guilds ne sont pas là pour faire de la gouvernance. Ils servent à garder un langage commun : design system, bonnes pratiques d’ingénierie, règles d’intégration.

L’objectif n’est pas d’homogénéiser, mais d’éviter que chaque squad évolue dans son propre monde.

Quand le système devient illisible → Installer du Product Ops

À partir de 3-5 squads, la coordination devient un métier en soi.
Pas un rôle ajouté en plus, mais un rôle qui garantit que le système tient :

  • métriques cohérentes ;
  • rituels efficaces ;
  • roadmap lisible ;
  • données fiables pour arbitrer.

Product Ops n’est jamais une mode. C’est un garde-fou pour éviter que la structure s’effondre sous sa propre complexité.

Trois contextes qu’on voit souvent - et ce qui marche vraiment

Dans un environnement très réglementé (banque, énergie, assurance)

L'enjeu, ce n’est pas la vitesse. C’est la maîtrise : dépendances transverses, obligations légales, multiples sponsors.

👉 Ce qui fonctionne : domaines forts + Tech Council + Product Ops. Pas des squads “alignées sur des personas”.

Dans une scale-up SaaS

Deux besoins dominent : aller vite, et ne pas casser ce qui marche.

👉 Ce qui fonctionne : squads orientées flux d’usage + cycles Shape Up + chapters design/engineering. Le combo vitesse + cohérence.

Dans un produit interne / DSI

Les dépendances sont partout et les sponsors nombreux.

👉 Ce qui fonctionne : domaines fonctionnels clairs + Product Ops solide + roadmap pilotée par impacts. Pas une réplique de ce que font les scale-ups.

Conclusion - Scaler, ce n’est pas copier un modèle : c’est réparer un système

Scaler, ce n’est pas ajouter des squads ou coller des tribes parce que c’est ce que font les scale-ups. C’est clarifier les frontières, réduire les dépendances et remettre tout le monde sur un même tempo.

Quand les domaines sont nets, que la vision guide les arbitrages et que chaque équipe sait ce qu’elle protège, l’organisation gagne naturellement en vitesse - sans forcer, sans complexifier.

👉 Le vrai levier du scale, ce n’est pas la structure. C’est la qualité du système de décision.

Chez Yield, on voit très vite où ça coince : dépendances mal dessinées, rôles flous, rituels qui compensent au lieu d’aligner. En quelques semaines, on identifie les 2-3 changements qui restaurent la vitesse et la clarté.

Si vous sentez que votre organisation a grossi plus vite que votre système, parlons-en : on peut vous aider à scaler sans perdre ce qui fait votre force.

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